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Pascal ou la maîtrise de l’esprit (par Jean Mesnard)

Conférence du 31 mai 2008 par Jean Mesnard 

Jean Mesnard
Jean Mesnard

La recherche contemporaine sur Pascal, dans les pays où elle est le plus active (France, Japon, États-Unis), s’intéresse de plus en plus, au-delà de la matière de la pensée de l’auteur, à sa forme, c’est-à-dire aux démarches qu’elle met en oeuvre, à l’originalité et à la virtuosité qui s’y découvrent. Orientation dont l’analyse même de la pensée, indirectement, a d’ailleurs beaucoup à profiter. C’est une sorte d’esquisse de réflexion sur ce sujet qu’entend donner la présente communication, amorce d’un ouvrage depuis longtemps en gestation, dont l’achèvement reste problématique, et dont on ne retiendra ici que quelques idées directrices, quelques éléments de composition et quelques exemples.

Comment Pascal a-t-il conquis cette maîtrise de l’esprit ? Essentiellement par son goût des sciences, notamment mathématiques. Un goût qui s’est trouvé particularisé, façonné par une culture et une expérience extrêmement variées, mais toujours dominées, où l’héritage antique s’est conjugué avec le nouvel esprit scientifique des débuts du XVIIe siècle et surtout avec une capacité d’invention toute personnelle. C’est en allant aux racines de tout cet ensemble qu’il a dégagé pour lui même, en théorie et en pratique, des lois de la pensée et un exercice idéal de l’esprit.

Mais ce qu’il y a peut-être de plus original en lui, c’est qu’il conçoit le modèle mathématique comme applicable, par un processus, soit de généralisation, soit de réduction, à toute forme de discours, passant ainsi de la géométrie à la rhétorique et à la dialectique, le tout bien au-delà de la pure logique, en préservant l’autonomie de chaque domaine et son degré propre de validité. Lorsqu’il écrit: « Travaillons donc à bien penser: voilà le principe de la morale », il n’ignore pas que « bien penser » est d’abord le principe de la connaissance. Mais tout le monde le sait. Ce que Pascal veut souligner, c’est que l’esprit qui constitue le savoir est le même que celui auquel il appartient de gouverner l’action. Il va sans dire qu’à l’extension de ses emplois correspond, pour la notion, un enrichissement remarquable de sa compréhension.

Tels sont les fils conducteurs qui commanderont les analyses des diverses démarches de l’esprit dans lesquelles se manifeste la maîtrise de Pascal. C’est sur trois d’entre elles que je me concentrerai :
1. La quête des principes ;
2. Les lois de l’inférence ;
3. Pensée et ordre.

Jean Mesnard est membre de l’Académie des Sciences morales et politiques.

Bulletin 2008 102 3